Premier cours qu'il va donner de sa vie, il a préparé son cours méthodiquement sur ses fiches comme un acharné. Walt n'a rien laissé au hasard, il porte même une chemise, c'est dire s'il n'a pas fait les choses à moitié. Après tout, c'est une grande responsabilité que lui a donné son professeur et il ne compte pas la gâcher. La salle de cours commence peu à peu à se remplir de premières années, la plupart passent devant lui sans même réaliser que c'est lui qui va donner le cours. Une fois installée, il commence son introduction, il n'a pas grand mal à captiver son auditoire enfin pendant un moment seulement. Certains élèves se mettent déjà à bailler, surement les séquelles du week-end d'inté qu'il connait si bien. Puis, au fond certains se mettent à discuter comme s'ils étaient au café du coin, se racontant leurs exploits de soirée. Walt tente de se contenir, il n'a pas envie d'exploser dès le premier cours. D'ailleurs, c'était la même chose quand il était lui-même en première année, la moitié des étudiants en sciences politiques n'avaient choisi ça que pour faire plaisir à papa, maman et n'avaient aucun intérêt pour la matière. Il débite le cours qu'il a préparé, en omettant les parties les plus compliquées auxquelles les étudiants ne semblent pas réceptifs. Un grand soulagement, voilà ce qu'il ressent quand le cours se finit enfin. « Rappelez-vous, il est encore temps de changer d'orientation, pour ceux que les sciences politiques n'ont pas encore achevés, on se voit la semaine prochaine. ». Il s'échappe de la salle avant ses élèves, avançant vite vers l'extérieur du bâtiment pour s'en griller une. Il a déjà la clope entre les dents prêt à l'allumer dès qu'il sera à l'air libre. Le sort décide de s'acharner sur lui avec un briquet qui n'a plus de gaz. Il se retourne vers la porte du bâtiment et interpelle le premier type qui sort. « Excuse-moi est-ce que t'aurais du feu ? ». Avec son air désespéré, il espère que quelqu'un aura pitié de lui et prendra deux secondes pour lui permettre d'allumer sa cigarette.

Son nouveau héros, ce jeune homme qu'il ne connait point encore. Il lui aurait presque fait un câlin. Il repousse ses cheveux en arrière et avance sa cigarette jusqu'à la flamme, à la première bouffée, il sent son corps instantanément. Il sourit à la remarque du jeune homme. « C'est le prix à payer j'en ai peur. ». Cette addiction, une fois qu'ont y a touché c'est bien difficile de s'en défaire. Depuis ses seize ans, la cigarette fait partie de lui. Des parents qui le laissent fumer dans la maison, étant fumeurs également. Il secoue un peu la tête sortant de son extase. « Où sont passés mes manières, je peux t'en payer une ? », sortant son paquet de sa poche l'ouvrant en direction de son sauveur. Son regard se pose naturellement sur la pochette de son interlocuteur, à croire que le rouge n'attire pas que les taureaux. Première année ? Son regard remonte vers son visage, il ne lui aurait pas donné dix-huit ans sur le coup. Quelque chose dans son attitude, les petits nouveaux sont généralement tout fous à cette période de l'année. Le fait d'être loin du cocon familial pour la première fois probablement. « Première année ? ». Regard interrogatif, il y a peut-être une histoire plus intéressante là-dessous. Tout le monde ne connait pas la trajectoire lycée-université de façon aussi direct que lui après tout. Son esprit retourne à son premier cours, sans qu'il le veuille. Peut-être qu'il s'était imaginé ça un peu plus facile que ça ne l'était vraiment. Il s'était imaginé des étudiants tous aussi passionnés que lui pour les sciences politiques, mais il a du revoir ses exigences à la baisse. Il aurait probablement à adapter son cours à son public, il en soupire rien qu'en y pensant oubliant presque qu'il n'est pas tout seul.

Walt ne peut s'empêcher de rigoler à l'évocation des femmes par son interlocuteur, il hoche la tête un peu bêtement, comme s'il y avait besoin d'une confirmation à cette question. Toutes les bonnes choses ont un prix à payer, que ce soit la cigarette, l'alcool ou les femmes. À croire que l'homme aime se faire du mal. Par contre vu le temps qu'il met à répondre à sa question, Walt commence vraiment à se demander s'il n'a pas dit une connerie, il préfère attendre sagement une réponse, histoire de ne pas en rajouter une couche si c'est le cas. Puis sa clope est là pour le soutenir, même si elle se consume déjà trop vite à son goût. Soulagement quand il réalise qu'il ne l'a pas vexé définitivement ou un truc du genre, certaines personnes peuvent se montrer vraiment trop susceptible parfois, mais aussi parce qu'il n'est pas un première année. Par contre, Walt l'envie beaucoup, parce que son cru à lui est déplorable. La question suivante, le laisse un peu perplexe, mais a le mérite de le faire rigoler et dieu sait qu'il en avait besoin après ce cours désastreux. « Pas vraiment, puis je pense pas avoir été comme ça de toute façon. ». Il lui adresse un sourire, parce que cette conversation lui fait du bien, alors qu'il ne connait le jeune homme ni d'Eve ni d'Adam. Comme quoi la vie est bien foutue par moment. « Moi qui croyais que mon professeur me faisait un cadeau en me confiant le cours des premières années. Je crois que je me suis bien fait niquer dans l'histoire, ils sont plus qu'indifférent à moi et aux sciences politiques pour le moment. ». Même s'il est un peu abattu pour le moment, Walt n'en demeure pas un éternel optimiste. Un jour il arrivera à leur transmettre sa passion pour la politique, il faut juste qu'il trouve la bonne méthode. S'il peut obtenir quelques conseils, il ne serait pas contre. « Ça fais longtemps que tu fais ça ? Parce que je débute et j'ai l'impression de tout faire de travers. ». Si ce n'était pas assez évident jusqu'ici.