VYX & NAESS

t'es pote avec vyx ?! oui, je crois. si tant est que notre relation s'arrête à ce genre de considération. mais elle est bizarre, c'te meuf. non, elle est pas bizarre, c'est toi qui est pas cortiqué et c'est pas une meuf, c'est une dame à sa façon. si j'avais moins de neurones et si j'étais physiquement apte à me battre, je te ferais ravaler tes paroles à coup de poing, mais heureusement pour toi, je suis un gringalet non-violent. quand on est moi, être pacifique est une nécessité pour survivre.
j'entends ça tous les jours. tout le monde s'interroge : pourquoi vyx, pourquoi vivre avec elle, pourquoi l'apprécier. et si je vous disais que je vous emmerde, et si je vous disais que votre avis ne m'intéresse pas. ce que vous pensez ne m'intéresse pas, heureusement pour nous vous ne le faites pas souvent. je n'éprouve pas le besoin de défendre vyx, elle peut se défendre elle-même et je sais que tout ça ne l'atteint pas. j'ai toujours pensé que j'étais plutôt imperméable à la critique et au regard des autres, mais à côté de vyx, je suis un parapluie troué.

c'est vrai qu'elle est différente, c'est vrai qu'elle ne répond pas au modèle habituel, c'est vrai qu'elle a l'air froide comme ça, mais j'ai passé des soirées démentes avec elle. dans notre petit appartement, on invite un pote chacun, je passe du aKido sur notre vieille chaîne et on boit des bières en discutant de tout et de rien. alors oui c'est vrai on va pas se déhancher en boîte, on écoute pas le dernier miley cyrus et non, on a jamais entendu parler du nouveau café branché qui vient d'ouvrir en ville et qui réunit toute la jeunesse dorée de palo alto.
mais le plus dur pour moi, c'est de vivre avec ma conscience. pinocchio avait jiminy cricket, j'ai vyx. je sens son regard qui se pose sur moi. je lis dans ses yeux, du même bleu que les miens, qu'elle me juge. parce que mon comportement est ridicule ou parce qu'elle comprend, mieux que tout le monde, qu'il m'arrive de prétendre, que tout ça ce n'est qu'un jeu. alors, elle me regarde et ça suffit. on parle peu. elle parle peu, moi je suis moi, j'ai besoin d'exprimer mes pensées parce qu'elles ne tiennent plus à l'intérieur de ma tête, mais elle, elle parle peu et elle n'en a pas vraiment besoin.  

j'entre dans notre appartement. c'est mon appartement en fait, mais vyx vit avec moi d'un commun accord avec moi-même. j'ai assez d'argent pour payer deux cent cinqante-sept fois le loyer - et vous vous doutez bien que j'ai vraiment fait le calcul - sans entamer ce que gagne mon père en un an. inviter vyx à vivre chez moi au frais de la reine, c'est un peu mon pied-de-nez à ce milieu social que j'essaye de fuir. elle est pauvre, je le sais, elle ne payera jamais la moitié du loyer de cet appartement, je le sais, mais je m'en fous. tu verrais le nombre de gens qui s’inquiètent de notre colocation, c'est presque touchant. je dépose le sac de course sur la table de la cuisine et je reviens dans le salon avec deux bières, une pour moi, une pour elle. ils ont l'air de croire que tu pourrais être ... toxique pour moi comme un déchet radioactif - enfin s'il savait ce que radioactif veut dire - mignon n'est-ce pas ?